Encadrement des loyers, inutile ?
L’encadrement des loyers en question : efficacité ou illusion ?
Contexte et objectifs de la mesure
- Origine : Mesure phare de la loi ELAN (2018), appliquée dans des métropoles tendues (Paris, Lille, Lyon, Bordeaux, Montpellier, Pays Basque).
- Objectif affiché : Protéger le pouvoir d’achat des locataires en limitant les hausses de loyers jugées excessives.
- Critiques des propriétaires :
- Réduction de la rentabilité des biens.
- Risque de désinvestissement (vente de logements, baisse de l’entretien).
- Assèchement du parc locatif à long terme.
L’étude CLAMEUR de Novembre 2025 : une méthodologie rigoureuse
Approche innovante
- Données utilisées : Baux de location signés (et non les annonces), pour refléter la réalité des loyers payés.
- Méthode : Analyse en doubles différences (Difference-in-Differences), considérée comme la plus robuste pour évaluer l’impact d’une politique publique.
Principe de la double-différence
- Comparaison temporelle :
- Évolution des loyers avant/après l’encadrement dans les villes concernées (ex : Lille, Lyon).
- Comparaison spatiale :
- Évolution comparée à des villes similaires non encadrées (groupe témoin).
- Résultat attendu : Si la loi est efficace, la différence entre les deux groupes devrait être significative après l’encadrement.
Résultats de l’étude : un effet "nul" sur les loyers
- Constat : À Lille et Lyon, l’évolution des loyers après l’encadrement est proche de 0%.
- Interprétation :
- La stabilisation des loyers est attribuable à des facteurs économiques généraux (offre, demande, conjoncture), et non à la loi.
- Aucune preuve que l’encadrement ait ralenti les hausses de loyers.
- Visualisation :
- Les données montrent que les loyers encadrés n’ont pas baissé significativement par rapport aux villes non encadrées.
Contradictions et enjeux politiques
- Rapport parlementaire (Echaniz - Le Meur) :
- Conclut à l’utilité de la mesure pour éviter les "loyers excessifs".
- Préconise son élargissement à d’autres agglomérations.
- Étude CLAMEUR :
- Remet en cause l’efficacité du dispositif.
- Soulève un paradoxe : pourquoi étendre une mesure qui n’atteint pas son objectif, tout en décourageant l’investissement locatif ?
- Décision à venir :
- Le gouvernement doit trancher avant novembre 2026 (fin de l’expérimentation).
- Mission d’évaluation officielle en cours pour éclairer la pérennisation ou l’abandon du dispositif.
Perspectives et questions ouvertes
- Pour les locataires :
- L’encadrement est-il un leurre ou un filet de sécurité symbolique ?
- Faut-il repenser les outils de régulation (ex : aides directes au logement) ?
- Pour les propriétaires :
- Comment concilier protection des locataires et attractivité de l’investissement ?
- Risque-t-on une crise de l’offre locative à moyen terme ?
- Pour les pouvoirs publics :
- Faut-il abandonner l’encadrement, le réformer, ou le cibler sur des zones ultra-tendues ?
- Comment arbitrer entre évidence scientifique (étude CLAMEUR) et pression politique (rapport parlementaire) ?
Conclusion : un débat loin d’être clos
L’étude CLAMEUR ébranle les certitudes sur l’encadrement des loyers, en démontrant son inefficacité mesurée sur les loyers réels. Elle pose une question cruciale : faut-il persister dans une mesure coûteuse pour les propriétaires et peu bénéfique pour les locataires, ou innover dans les politiques du logement ?
Affaire à suivre, donc, alors que le gouvernement s’apprête à prendre une décision lourde de conséquences pour le marché locatif français.
Pour aller plus loin